

LCORL : un des gènes majeurs de la taille au garrot
La hauteur au garrot d’un équidé est l’un des critères de caractérisation les plus utilisés, notamment (mais pas seulement) chez les poneys de sport. Ce caractère est gouverné par une multitude de gènes, mais l’un d’entre eux (LCORL) aurait un rôle majeur.


- À propos du gène LCORL
- Génotype taille : « petit » ou « grand »
- Influence du génotype sur la taille chez les chevaux de race Selle Français (SF)
- Et pour la production de poneys ?
- Limites du test et déterminisme du phénotype « taille »
À propos du gène LCORL
Comme beaucoup de caractères quantitatifs, la taille au garrot repose sur l’interaction d’une multitude de gènes. Pas moins de 200 gènes sont cités par la littérature scientifique. Selon les types de chevaux, l’un ou l’autre parmi ces gènes aura un rôle prépondérant. Le projet SoGen (abréviation pour « Génomique du saut d'obstacles ») a permis de quantifier l’influence du gène LCORL dans la population de chevaux de sport français. Ce gène est situé sur le chromosome 3 du cheval. Chez les chevaux de sport, il explique à lui seul une amplitude de variation de la taille de 8 cm (+/- 4 cm autour de la taille moyenne de la population).
Génotype taille : « petit » ou « grand »
Le test de génotypage synthétise les résultats de deux marqueurs génétiques proches du gène LCORL, qui a un effet majeur sur la taille. Il y a trois génotypes possibles selon les allèles présents sur les deux chromosomes homologues de la paire en question (chromosome 3) :
- petit/petit
- petit/grand
- grand/grand
Le génotype attribué dépend de la cohérence entre les mesures des deux marqueurs génétiques. Dans de rares cas, il peut y avoir une incohérence entre les deux marqueurs utilisés ; le résultat du test serait alors considéré comme non interprétable. Bien noter qu’un test de génotypage a un taux d’erreur très faible, inhérent à différents facteurs génétiques et/ou techniques.
Influence du génotype sur la taille chez les chevaux de race Selle Français (SF)
Porté par l’Institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) et l’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), financé par le Fonds Éperon avec la participation de l'organisme de sélection de la race Selle Français (SF), le projet de recherche SoGen a permis, entre autres, de mesurer l’influence du génotype des marqueurs génétiques (SNP) proches du gène LCORL sur la taille au garrot chez les chevaux de race SF. À la naissance, le génotype du poulain permet d’estimer en partie sa future taille adulte :
- Les chevaux « petit/petit » ont en moyenne une taille de 163,0 cm ;
- Les chevaux « petit/grand » ont en moyenne une taille de 166,7 cm ;
- Et les chevaux « grand/grand » ont en moyenne une taille de 169,6 cm.
Puisque les chevaux hétérozygotes (c'est-à-dire les « petit/grand ») affichent des phénotypes intermédiaires entre les deux populations d’homozygotes (c'est-à-dire les « petit/petit » et les « grand/grand »), on a ici l’illustration d’un fonctionnement du gène en co-dominance.
La répartition dans la population étudiée est la suivante :
- 12% de « petit/petit »
- 52% de « petit/grand »
- 36% de « grand/grand »
Cependant, il existe toujours une variabilité autour de ces moyennes : l’écart-type de la distribution de chaque génotype est d’environ 3,6 cm, ce qui donne les distributions des tailles en fonction des génotypes de la figure 1 ci-dessous.
Lors d’un accouplement, il est possible de prédire en probabilité le génotype de la taille du poulain à naître en fonction du tableau 1 ci-dessous.
Génotype des parents | Père Selle Français | |||
petit/petit | petit/grand | grand/grand | ||
Mère Selle Français | petit/petit | 100% petit/petit | • 50% petit/petit • 50% petit/grand | 100% petit/grand |
petit/grand | • 50% petit/petit • 50% petit/grand | • 25% petit/petit • 50% petit/grand • 25% grand/grand | • 50% petit/grand • 50% grand/grand | |
grand/grand | 100% petit/grand | • 50% petit/grand • 50% grand/grand | 100% grand/grand |
Et pour la production de poneys ?
Étudié initialement chez les chevaux de sport, le gène LCORL a aussi un rôle prépondérant chez les poneys, notamment lorsque ces derniers sont issus d’un croisement cheval-poney. Le projet PoinTailGen, porté par l’IFCE, l’INRAE et l’Association nationale du Poney français de selle (ANPFS), a permis de développer le test en laboratoire du gène LCORL, afin que le résultat de celui-ci soit disponible pour les éleveurs et ainsi leur permettre de raisonner au mieux leurs croisements.
Influence du génotype des parents sur le phénotype probable du produit
Prenons le cas d'un croisement entre un parent 1 de type « poney » et un parent 2 de type « cheval de sport ».
Génotype des parents | Parent 2 de type « cheval de sport » | |||
petit/petit | petit/grand | grand/grand | ||
Parent 1 de type « poney » | petit/petit | 100% petit/petit | • 50% petit/petit • 50% petit/grand | 100% petit/grand |
petit/grand | • 50% petit/petit • 50% petit/grand | • 25% petit/petit • 50% petit/grand • 25% grand/grand | • 50% petit/grand • 50% grand/grand | |
grand/grand | 100% petit/grand | • 50% petit/grand • 50% grand/grand | 100% grand/grand |
À la naissance, le génotype du poulain, prédit par le tableau 2 ci-dessus, indique la probabilité du génotype du produit qui finalement servira à prédire sa taille probable selon le tableau 3 ci-dessous. Le faible nombre de poneys actuellement à la fois mesurés et génotypés ne permet pas une prédiction plus précise, mais cette prédiction devrait s’affiner grâce à l’augmentation du nombre de poneys mesurés et génotypés.
Génotype | Phénotype « taille au garrot » |
---|---|
petit/petit | Le plus probable est que le produit soit de la « taille poney » |
petit/grand | Il y a un risque important que le produit soit de la « taille poney » |
grand/grand | Il y a un risque très fort que le produit dépasse la « taille poney » |
À ce jour, le nombre de poneys ayant à la fois été toisés et génotypés est encore insuffisant pour que soient établies des courbes de répartition analogues à celles de la figure 1 concernant les chevaux de race Selle Français. Des chiffrages plus précis seront diffusés dès que disponibles.
Limites du test et déterminisme du phénotype « taille »
La taille est un caractère polyfactoriel : elle dépend de l’influence des gènes et de l’influence du milieu (alimentation, conditions d’élevage…). De nombreux gènes (plusieurs centaines chez l’Homme ou encore les bovins par exemple) sont responsables du déterminisme génétique de la taille. Parmi eux, le gène LCORL a un effet majeur (c’est-à-dire important) sur la taille, mais il n’est pas unique. Le test actuellement proposé ne génotype que ce gène majeur. N’étant pas le seul facteur, génétique ou environnemental, de la taille, le génotype à ce gène ne permet que de déterminer une probabilité d’avoir une taille donnée. Ainsi, il existera toujours des équidés génotypés « petit/petit » qui auront une taille supérieure à certains équidés génotypés « grand/grand ». Mais dans la majorité des cas, les équidés de génotype « petit/petit » seront plus petits que les équidés de génotype « grand/grand ».
Le gène LCORL est important dans le cadre d’un croisement entre un équidé de type « poney » et un équidé de type « cheval » ou d’équidés eux-mêmes issus de ces croisements. Chez ces deux types d’équidés, les deux versions du gène coexistent et ont donc un impact sur la taille. Chez les races de poneys pour lesquelles ce n’est pas le cas, le génotypage du gène LCORL seul ne donne pas d’information sur la taille : il ne permettra pas de distinguer les différences de taille importantes au sein de ces races de poneys, qui seront toutes de génotype « petit/petit ». Par exemple, un Connemara de 1m46 et un Welsh B de 1m25 auront le même génotype « petit/petit » concernant le LCORL, alors qu’ils sont porteurs de mutations différentes sur d’autres gènes influant en parallèle sur la taille.

En savoir plus sur nos auteurs
- Bernard DUMONT SAINT PRIEST Ingénieur de recherche & développement « Caractérisation des équidés » IFCE
- Margot SABBAGH Ingénieure de projets & développement « Génétique des équidés » IFCE
- Margot COLIN Cheffe du service et de la plateforme « Génomique » du Labéo Frank Duncombe (14)
- Sophie POLLET Chercheuse à l'INRAE de Jouy-en-Josas (78)
