Programmer les séances de galop - les précurseurs

En fonction de l’objectif de la saison, les entraîneurs programment des cycles d’entraînement qui intègrent des séances de galop. Par le passé de nombreuses préparations très différentes ont été utilisées avec succès dans la préparation du cheval de concours complet. Pour bâtir notre réflexion, il est utile de connaître les pratiques qui étaient en usage à partir des témoignages écrits ou oraux des entraîneurs nationaux ou des cavaliers qui ont alors représenté la France.

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Par Patrick GALLOUX - | 10.01.2017 |
Niveau de technicité :
Cavalier au galop © A. Bassaler
Sommaire

Ce qu'il faut savoir avant de commencer

Planification classique, la charge (généralement fonction de la durée ou de la distance, la vitesse restant constante) augmente au fur et à mesure de l’entraînement, la ou les dernières séances sont de moindre intensité.
Graphique 1 - Planification classique, la charge (généralement fonction de la durée ou de la distance, la vitesse restant constante) augmente au fur et à mesure de l’entraînement, la ou les dernières séances sont de moindre intensité.

Dans les entraînements décrits ci-après, la montée en charge est généralement progressive avec des séances d’entraînement du même type, la vitesse est souvent identique dans tous les entraînements, seule la durée de la séance ou le nombre de séries évoluent. La dernière séance avant l’objectif principal a une intensité moins importante que les autres. (Graphique 1)

Ne recherchant aucune surcompensation, les séances sont suffisamment espacées (5 à 7 jours) pour éviter toute accumulation de la fatigue. Elles prennent des formes très variées qui seront décrites ci-dessous.


Le principe de surcompensation est le phénomène qui permet à l'organisme, après avoir subi un stress, de développer une capacité fonctionnelle supérieure. C'est un mécanisme d’adaptation qui permet, après avoir réalisé une période de récupération, de générer un plus haut niveau de performance.

Les séances de type course

Développée

Exemple d’un cycle spécifique sur 4 semaines avec un galop hebdomadaire soutenu : 2 x 500 à 800 m à V max puis 3 min de pas.
Graphique 2 : Exemple d’un cycle spécifique sur 4 semaines avec un galop hebdomadaire soutenu : 2 x 500 à 800 m à V max puis 3 min de pas. (Cliquez dessus pour agrandir)

Après la deuxième guerre mondiale, cette programmation est  le témoignage logique du passé de gentleman-rider des nombreux cavaliers militaires de concours complet.

Le cheval galope tous les jours sur 500 à 800 m, "dans l'action". Si le cavalier ne dispose pas de pistes excellentes, le travail est réduit à deux galops par semaine sur 1000 à 1500 m, à une vitesse qui croît de 400 à 600 m/min.


À l'issue de ce premier mois, commence un travail "en fractionné", pour profiter de l'activité cardiaque de la récupération, consécutive à un effort violent, et développer les capacités cardio-vasculaires du cheval. Ainsi deux galops sont donnés à vitesse maximale, sur 500 à 800 m, entrecoupés de trois minutes de pas. Cet exercice est effectué une fois par semaine, sur de très bonnes pistes, par un cavalier léger.

Un mois avant l'épreuve, la période de préparation finale débute par un test : le cheval doit être capable d'accélérer pendant les 300 derniers mètres d'un travail de 3000 m à 700 m/min. Dans ce cas, un travail d'entretien comprenant deux galops légers par semaine, suffit à affiner la préparation. Dans le cas contraire, il est nécessaire d'effectuer trois bouts-vite (vitesse maximale) de 800 m répartis tous les cinq jours.

Le travail par intervalles courts

Exemple de Michel Cochenet

L'idée est de fractionner le travail pour limiter la fatigue, en diminuant le temps de course et en réalisant des récupérations complètes. La récupération est jugée par la prise des pulsations cardiaques à l'arrêt : le cheval ne repart pour une nouvelle série que lorsqu'il a retrouvé un pouls "normal". L'abondance de la transpiration fixe la fin de la séance. On distingue la mise en condition, la mise en souffle et le travail de la vitesse (musculation cardiaque). La mise en condition est obtenue grâce à un travail quotidien par intervalles. Le cheval galope à 400 m/min pendant une minute et marche au pas une minute et demie. Le nombre des séries augmente progressivement de 5 à 16 au cours du premier mois.

Exemple de cycles de préparation générale où le cheval effectue quotidiennement 5 à 16 x 1 min à 400 m/min, 1min30 au pas
Graphique 3 : Exemple de cycles de préparation générale où le cheval effectue quotidiennement 5 à 16 x 1 min à 400 m/min, 1min30 au pas (Cliquez dessus pour agrandir)

Le travail en continu

Exemple du commandant Lefrant

Exemple de cycle spécifique où on alterne par semaine travail lent, 20 min en continu et travail rapide 3min à 650 m/min.
Graphique 4 : Exemple de cycle spécifique où on alterne par semaine travail lent, 20 min en continu et travail rapide 3min à 650 m/min. (Cliquez dessus pour agrandir)

Il est encore préconisé pour l'entraînement des chevaux nerveux. Plusieurs variantes existent :

Le travail commence en galopant lentement (350 à 400 m/min), pendant 6 à 8 minutes, puis augmente progressivement pour atteindre à la fin du dernier mois, 20 à 30 minutes, au petit canter.

Pour préparer les grandes épreuves (format long de l’époque), quelques cavaliers augmentaient l'intensité. Ils galopaient leurs chevaux 8 000 à 12 000 m en continu à 500m/min. Ce travail pouvait être renouvelé tous les quatre jours.


Une autre variante combine un travail lent et long avec un travail plus intense. Une période préliminaire prépare le cheval à galoper 20 à 30 minutes, à 350 m/min. Puis les galops hebdomadaires sont réduits de 15 à 20 minutes à 350 m/min et alternent avec des galops rapides et courts à 650 m/min. Avec les chevaux chauds, cette préparation peut être remplacée par un travail intermédiaire de 2000 m, à une vitesse croissante de 400 à 600 m/min.

Le travail par intervalles longs

Cet entraînement était le plus pratiqué dans les années 1980. Comme dans le travail continu, la vitesse reste constante et assez faible. A l'étranger et en particulier en Angleterre, le travail se termine par une accélération.

Après un entraînement de base, les différents entraîneurs proposent plusieurs programmes qui se terminent par les galops suivants :

  • Méthode américaine : 3 x 10 min à 400 m/min
  • Méthode française : 3 x 7 min à 450 m/min
  • Méthode britannique : 3 x 6 min à 400 m/min,
    - la fin du 2ème intervalle à 550 m/min,
    - la fin du 3ème intervalle à 650 m/min.

Tous ces intervalles sont entrecoupés de trois minutes de pas. Cette récupération passive n'est pas toujours bien supportée par les chevaux délicats qui s'énervent en trottinant. Les cavaliers préfèrent alors le même travail en continu. Le dernier galop a lieu huit à dix jours avant l'épreuve de cross.

Deux exemples de préparation classique utilisée par Jean-Paul Bardinet

(Entraîneur national de 1978 à 1992)

Tableau 7 - Exemple de préparation pour une compétition ne comportant qu'un cross.
Niveau de la compétition :
Durée du travail :
Galop hebdomadaire :
Vitesse :
Récupération au pas :
Départemental
1heure à 1h15
1x5 min ou 2x3 min
400 m/min
3 min
Régional
1h15 à 1h30
3x3 min
400-450 m/min
3 min
National
1h30 à 2 heures
3x4 à 5 min
400-450m/min
3 min
Tableau 8 - Exemple de préparation pour une compétition comprenant un steeple-chase et un cross.
Niveaucritérium, championnat, CCI* avec steepleCCI ** et CCI *** avec steeple [1]
Galop 1Remplacés par une épreuve de niveau régional3 x 4 min à 400 / 450 m/min
Galop 23 x 4 min à 400 / 450 m/min
Galop 33 x 3 min à 400 / 450 m/min3 x 5 min à 400 / 450 m/min
Galop 43 x 3 min à 400 / 450 m/min3 x 5 min à 400 / 450 m/min
Galop 5 [2]3 x 4 min à 400 / 450 m/min3 x 6 min à 400 / 450 m/min
Galop 673 x 4 min à 400 / 450 m/min3 x 6 min à 400 / 450 m/min
Galop 773 x 5 min à 400 / 450 m/min3 x 7 min à 400 / 450 m/min
Galop 873 x 5 min à 400 / 450 m/min3 x 7 min à 400 / 450 m/min
Galop 92 x 4 min à 400 / 450 m/min2 x 5 min à 400 / 450 m/min

[1] Ancienne norme, c’est à dire un CCI *** (Badminton, Burgley,…) correspond aux CCI **** actuels.

[2] Un allongement peut être demandé à l'issue de la deuxième série des séances de galop n° 5, 6, 7, 8.

 Exemple de 6 cycle d’entraînement en intervalles longs : 3 x 4 à 7 min à 400-450 m/min, entrecoupés de 3 min au pas
Graphique 5 : Exemple de 6 cycle d’entraînement en intervalles longs : 3 x 4 à 7 min à 400-450 m/min, entrecoupés de 3 min au pas (cliquez dessus pour agrandir)

Conclusion

L’objet de cette fiche était de présenter la grande variété des programmations d’entraînement proposées par les spécialistes de la discipline et de préciser, quand cela était possible les règles d’emploi. Elles ont toutes conduits à des podiums internationaux dans une compétition qui reste pluridisciplinaire et dont le classement final est le résultat d’une préparation diversifiée et équilibrée. Il reste au lecteur d’avoir un regard critique et mesuré qui devra tenir compte :

  • De la nature des épreuves de fond de l’époque : L’épreuve de fond a beaucoup évolué à partir des JO de Londres, avec la suppression de points de bonification, la suppression du steeple-chase et du 2ème routier en 2004, le raccourcissement du cross entre 5700 et 6270 m (Rome 1960 : 8400 m à 450 m/min, Séoul 7410 m à 570 m/min, Rio 5830 m à 570 m/min), la distinction des épreuves de CIC avec un effort par 100 m de course, des CCI où les efforts sont répartis tous les 125 à 140 m.
  • Et du peu de moyens de contrôle alors disponibles en routine.
En savoir plus sur nos auteurs
  • Patrick GALLOUX IFCE - Phd, BEES 3 Équitation, ancien Écuyer du Cadre noir de Saumur, Inspecteur de la Jeunesse et des Sports (HC)

Bibliographie

  • GALLOUX P. ; BESSAT G. (2018) : L’entraînement du couple cheval de sport / cavalier. Ifce, 252 p.
  • GALLOUX P. (2011) : Concours complet d’Equitation. Belin, 234 p.
Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

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