Entretien des pâtures au printemps

Qu’elles soient pâturées ou bien fauchées, les prairies doivent être entretenues régulièrement au cours de l’année. L’objectif ? Favoriser une pousse productive et homogène de l’herbe, en qualité et quantité suffisante pour répondre aux besoins alimentaires des chevaux. Les points de vigilance et les pratiques ne sont cependant pas tout à fait les mêmes en fonction des saisons. Au cours de l’hiver, le but est de favoriser la régénérescence du couvert végétal en prévoyant un temps de repos. À l’arrivée des beaux jours, l’objectif sera plutôt d’aider la reprise de végétation des graminées et légumineuses fourragères et de bien gérer la conduite des prairies par la suite pour les valoriser de façon optimale. Cette fiche propose un focus sur les clés d’un bon entretien des prairies au printemps.

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Par Pauline DOLIGEZ - Nelly GENOUX - | 30.03.2022 |
Niveau de technicité :
prairie en sortie d'hiver
Sommaire

Pourquoi entretenir ses prairies au printemps ?

Alternances de gel/dégel, humidité, tassement du sol et ornières liés au passage des engins agricoles, piétinement par les chevaux qui restent hébergés en extérieur, en particulier autour des zones d’affouragement… la qualité des prairies (sol et couvert végétal) se dégrade souvent durant l’hiver. Chaque année, l’arrivée des beaux jours est le moment d’entretenir les prairies, juste avant la reprise de végétation. L’objectif ? Favoriser la pousse d’un couvert végétal de qualité à la fois sur les prairies pâturées, en vue de la saison de pâturage, et sur les prairies de fauche, en vue de la récolte des fourrages. Des ressources fourragères de qualité permettent en effet de couvrir en grande partie les besoins alimentaires des catégories d’équidés à forts besoins (poulinière en fin de gestation ou en lactation, jeune cheval en croissance). Les opérations d'entretien doivent s'effectuer régulièrement pour toujours maintenir un couvert végétal « fermé » et donc limiter le sol nu.

Comment entretenir ses prairies au printemps ?

Herser pour niveler le sol

Les effets bénéfiques du hersage sur la pousse de l'herbe sont discutés et dépendent des espèces présentes, du niveau d'hygrométrie du sol et du matériel utilisé. En revanche, le passage de la herse a des effets positifs sur la couche superficielle du sol :

  • Effet aérateur par décompactage du sol, en particulier sur les zones qui ont été gorgées d'eau au cours de l'hiver.
  • Nivellement du sol, notamment au niveau des zones piétinées et défoncées durant l'hiver.
  • Étalement des taupinières et dissémination des éléments fertilisants des déjections pour une meilleure assimilation de la matière organique par le sol.

Le hersage diminue ainsi les risques de pollution du fourrage par de la terre ou des crottins au cours de la récolte des fourrages, potentiellement source d’agents pathogènes (poussières, bactéries…). En disséminant les crottins, le hersage présente cependant l’inconvénient de favoriser la dispersion des larves de parasites, participant ainsi à la contamination parasitaire des parcelles par temps humide.

herse avec semoir
Herse avec semoir © C. Capy (CA19)
hersage
Prairie tout juste hersée en début de printemps © N. Genoux


Bonnes conditions de réalisationMauvaises conditions de réalisation
État du couvert végétalSur une herbe raseVégétation déjà haute (> 10 cm) ⇒ la herse couche et abîme le végétal
État du solSur un sol bien ressuyé (premiers centimètres de sol secs, sans trace d'humidité)
  • Sur un sol trop humide ⇒ risque de tassement supérieur à l'effet aérateur de la herse
  • Sur un sol trop sec ⇒ la herse rebondit sans pénétrer dans le sol
Lorsque les conditions de réalisation ne sont pas optimales, il est préférable de ne pas herser, plutôt que d’abîmer la prairie.

Le hersage ne permet pas d'améliorer la productivité de la prairie, ni la minéralisation (transformation de la matière organique en éléments fertilisants pour la plante). Cette pratique est surtout utile pour préparer les surfaces de fauche au printemps.

Rétablir un couvert homogène

herse avec semoir
Hersage couplé au semis © C. Capy (CA19)
Toute zone dénudée risque d'être colonisée par des plantes indésirables (graines présentes dans le sol). La réalisation d’un diagnostic floristique permettra de connaître la composition en espèces végétales de la prairie afin de déterminer l’opération à effectuer :

  • Un semis pour semer sur une surface totalement nue (cas d’une rénovation complète avec destruction du couvert végétal abimé, voire désherbage par exemple).
  • Un sursemis pour regarnir certaines zones nues d’une prairie installée, sans détruire le couvert végétal existant.

Principes et intérêts du sursemis

Zone dénudée
Réaliser un sursemis sur les zones nues, propices au développement des adventices si rien n'est fait © P. Doligez
Le sursemis consiste à ressemer des espèces végétales favorables au pâturage (espèces de graminées dites « gazonnantes » et résistantes au piétinement) sur une prairie déjà installée mais qui s'est dégradée, au niveau des zones dénudées (entrée de parcelle, zones d’affouragement et autour des abreuvoirs, piétinées durant l’hiver). Il s'agit de semer les graines « à la volée » sur les zones de terre nues, puis de rouler avec un engin ou faire piétiner par les chevaux le temps que les graines s'intègrent au sol. Les objectifs ?


  • Préserver la portance du sol (capacité de résistance du sol au poids des animaux).
  • Limiter l'envahissement de ces zones par les adventices (plantes indésirables), notamment celles résistantes au piétinement (comme le plantain) non consommées par les équidés.
  • Éviter le maintien de zones de sol nu propices à la dissémination de spores responsables de maladies, comme la rhodococcose.
Choix des espèces à implanter et densité de semis

Concernant le choix des espèces les plus adaptées, tout dépend des conditions pédoclimatiques de la parcelle et de son utilisation. Demander conseil à un conseiller fourrager d’une Chambre d’agriculture locale. De manière générale, il faut s’orienter vers des espèces « agressives » qui s’implantent rapidement, comme le ray-grass (anglais, hybride ou italien) et le trèfle blanc ou violet, à une densité de 5-10 g/m2 sur les petites surfaces ou 25-30 kg/ha pour les plus grandes surfaces. En revanche, elles sont de courtes durées (2-3 ans). Éviter la fétuque et le dactyle.

Quelles sont les bonnes conditions de réalisation du sursemis ?
  • Réaliser le sursemis dans une période où les températures et l'humidité sont favorables à la germination (plus de risque de gelée).
  • Le restant du couvert végétal de la zone à semer doit être courte (5-7 cm de hauteur) pour que les jeunes plantules aient accès à la lumière.
  • Si la surface est envahie par des adventices (mauvaises herbes), il est possible de traiter avec un herbicide au préalable. Attention cependant, le désherbage induit la destruction des légumineuses en place, comme le trèfle.
Quel matériel/équipement utiliser ?
  • Utiliser un semoir (à engrais par exemple) ou semer à la volée à la main. Le semis peut aussi être couplé avec l'apport d'un amendement de fond (phosphore et potasse).
  • Ne pas apporter d'azote lors du semis.
  • Rouler le sol pour favoriser le contact entre les graines et le sol ou entrer les chevaux dans la parcelle. Le piétinement remplacera ce travail, en condition de sol portant. Le tallage est alors favorisé (croissance de feuilles nouvelles à la base de la plante).
Le coût d’un sursemis s’élève à environ 150 à 180 €/ha.

Amender la prairie pour la rendre plus productive

L’activité biologique des plantes entraîne une exportation des nutriments du sol vers la partie aérienne de la plante et une acidification du sol. À terme, une acidification excessive et l’appauvrissement du sol en nutriments minéraux limitent le développement des végétaux. Les amendements (organiques ou minéraux) sont des apports qui vont améliorer la structure du sol et favoriser le développement des végétaux. L’apport d’éléments fertilisants directement assimilables par la plante est intéressant pour favoriser la croissance et le développement des végétaux.

Chaulage

Le chaulage d'entretien consiste à apporter des amendements ou produits basiques, à base de calcium (Ca) et de magnésium (Mg), c’est-à-dire des molécules chargées positivement, pour réduire l’acidité du sol. Il permet de compenser l'acidification du sol provoquée par la minéralisation des nutriments dans le sol (transformation des molécules complexes en nutriments directement utilisables par la plante). Il améliore la vie microbienne et l'efficacité des apports d'engrais et amendements en augmentant leur minéralisation. En outre, le chaulage permet aussi de limiter le développement de plantes favorisées par les milieux acides (comme les renoncules).

Pour que l’apport soit adapté, il faudra vérifier au préalable, par une analyse de sol, que le pH du sol est inférieur à 6,5. Un sur-chaulage peut entraîner un blocage du phosphore et des oligoéléments dans le sol. La productivité de la prairie en serait fortement altérée. Le chaulage ne permet pas de réduire la charge parasitaire des prairies.
Fertilisation azotée pour booster la pousse de l’herbe

La fertilisation azotée favorise la croissance des plantes. Chez les graminées, l'engrais azoté augmente :

  • La précocité : production plus rapide en matière sèche.
  • La productivité : production totale plus importante par cycle végétatif.

La valeur nutritionnelle du fourrage dépend de la digestibilité de la matière organique des végétaux, qui est liée au stade de végétation, au mois et au numéro de cycle exploité de la parcelle plutôt qu'au niveau de fertilisation azotée apportée. Avec une croissance accélérée, le stade épiaison est atteint plus tôt dans la saison, ce qui fait chuter plus vite la valeur du fourrage, mais le rendement (quantité de fourrage récoltée) se trouve augmenté. En revanche, la fertilisation azotée peut nuire au développement des légumineuses (trèfle, lotier…), elles-mêmes très riches en protéines.

Pratiquer le déprimage sur les parcelles destinées à la fauche

déprimage
Faire déprimer en début de printemps pour retarder l’épiaison des graminées © N. Genoux
Réalisé dans les parcelles de fauche en début de printemps, le déprimage est un pâturage précoce et superficiel par les équidés, avec une rotation rapide. L’objectif est d’étêter le couvert prairial, et notamment les graminées, pour éliminer les épis des plantes les plus précoces et retarder l'arrivée des graminées au stade épiaison (stade épi 1 cm, à partir duquel la valeur nutritionnelle des plantes diminue).

En favorisant le tallage et donc la production de feuilles, plus intéressantes d’un point de vue nutritionnel, cette pratique améliorera la qualité des fourrages récoltés plus tardivement sur ces parcelles. Pour les exploitations ayant d’importantes surfaces herbagères, cette pratique est aussi un moyen d’anticiper la pousse de l’herbe pour ne pas se laisser dépasser au printemps, tout en profitant des nouvelles pousses.

Pour être efficace, le déprimage doit être rapide et court. Il faut connaître son parcellaire et repérer les parcelles qui sont les plus précoces pour soit les faucher en premier lieu, soit les faire déprimer pour retarder l'épiaison. Il est recommandé de faire entrer les animaux dans la parcelle à une hauteur d’herbe d’environ 8 cm, et de les sortir dès que la hauteur du couvert avoisine les 4-5 cm.

Ce qu'il faut retenir

• Herser les parcelles au début de printemps pour niveler et aérer le sol après les contraintes (piétinement, humidité, gel/dégel…) subies au cours de l’hiver.
• Chauler si nécessaire pour réduite l’acidité du sol.
• Effectuer un sursemis sur les zones nues pour rétablir un couvert homogène et limiter le développement des adventices sur ces zones.
• Pratiquer un déprimage sur les prairies de fauche pour favoriser le tallage et améliorer la qualité du fourrage récolté.
En savoir plus sur nos auteurs
  • Pauline DOLIGEZ Ingénieure de projets & développement « Alimentation et entretien des équidés » IFCE
  • Nelly GENOUX Ingénieure agronome - ingénieure de développement IFCE

Bibliographie

  • CRÉMER S. (2015). L'entretien des prairies. Fourrages Mieux absl, 18 pages.
  • HUBERT F. et PIERRE P. (2109). Guide pour un diagnostic prairial - Une méthode pour faire le diagnostic de vos prairies - Une flore pour identifier les espèces. Chambre d'agriculture Pays de la Loire, 242 pages.
  • Site web d'ARVALIS - Institut du vgétélal : www.arvalisinstitutduvegetal.fr
  • Site web de l'Idele - Institut de l'élevage : www.idele.fr
Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

Fiche réalisée avec nos partenaires

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