La logique interne du concours complet

Cette fiche sur la « logique interne » de la discipline, décrit les éléments spécifiques du Concours Complet d’Équitation et les facteurs essentiels permettant d’envisager la performance. Première étape d’une planification raisonnée de l’entraînement, elle précède l’analyse des facteurs de la performance qui en détaillera les composants et fixera le niveau attendu pour chaque étape de progression vers le haut niveau.

1

Par Patrick GALLOUX - Guy BESSAT - Philippe MULL - | 16.01.2018 |
Niveau de technicité :
Matthieu Van Landeghem et Trouble Fête en cross © P. Chevalier
Sommaire

La logique interne

La notion de « logique interne » est en général particulière au champ de l’éducation physique et sportive. Elle a pour but de caractériser et de spécifier une activité. Utilisée pour l’analyse des conditions de sa pratique, elle définit les éléments de la performance et pour chaque compétence, les attendus et les priorités en distinguant au moins quatre dimensions :

  • Motrices
  • Cognitives
  • Affectives
  • Relationnelles

Le concours complet d’équitation, véritable triathlon de l’équitation, enchaîne trois épreuves différentes généralement dans l’ordre suivant : le dressage, le cross et l’hippique.

Pour le cavalier, il s’agit d’activités :

  • De pilotage pour réaliser des tracés précis dans un temps imparti
  • D’équilibre « de luxe »1, de souplesse tonique, voire de force, pour fonctionner avec relâchement et en accord avec sa monture
  • De perception pour comprendre son cheval et lui donner les bonnes informations
  • À risque, compte tenu de la fixité des obstacles du cross

Pour le cheval, il s’agit d’activités :

  • D’endurance et de résistance pour réaliser l’épreuve de cross dans le temps
  • De force et de souplesse pour développer des allures brillantes et sauter des obstacles dans des conditions et des profils très variés
  • De courage et d’adresse pour effectuer un parcours sur des obstacles inconnus et souvent placés dans des situations complexes

Pour chaque épreuve, le couple doit réaliser d’une manière optimale des figures jugées, des sauts sur des obstacles mobiles ou d’extérieur fixes suivant un tracé précis ou choisi dans un environnement dynamique et en extérieur.

1 - André THOMAS définit les activités sportives à "équilibre de luxe" comme étant celles impliquant de fortes rotations ou forces transmisses par l'impulsion. Dans ces activités sportives, le placement du regard est important afin de stabiliser la tête et de transmettre l'information au reste du corps ("Posture et équilibration humaine" de Thierry PAILLARD). Catégoriser l’équitation montée en "sport de glisse" me semble impropre. Utilisé dans le "management du sport" ("génération glisse"), ce terme définit plutôt des activités «fun», de liberté, telles que le ski, le surf... dans lesquelles la proprioception est prépondérante pour l'équilibre.

Le dressage

Thibault Valette et Qing du Briot en dressage © Ifce
Thibault Valette, Qing du Briot © Ifce

L’épreuve de dressage consiste à effectuer une « reprise », c’est à dire un enchaînement de figures imposées sur un tracé défini. Cette épreuve permet d’évaluer le dressage du cheval (ses allures, son impulsion et sa soumission), la justesse du cavalier dans l’efficacité de ses aides et l’harmonie du couple (position et assiette)2. Chaque figure est notée ainsi que l’impression d’ensemble de la prestation du cavalier et du cheval ; Un total est calculé pour déterminer le classement dans ce test. Une pondération permet d’appliquer des points de pénalités3.

Pour répondre aux attentes des juges, il est nécessaire de se rapporter à la note FFE sur l’échelle de progression du dressage du cheval4 et à la fiche de Bernard MAUREL, juge international, sur « Les observables de l'échelle de progression ».

En fonction de son niveau, le cheval doit, dans cet ordre :

  • Disposer de belles allures naturelles, rythmées, symétriques et régulières
  • Se déplacer avec souplesse et décontraction
  • Avoir un bon contact, c'est-à-dire « être sur la main »5
  • Avoir une bonne propulsion que nous qualifierons d’impulsion6
  • Présenter une bonne rectitude et des incurvations égales7
  • Pour le plus haut niveau, être rassemblé

Le cheval doit avoir un bon tempérament pour se présenter décontracté dans une arène organisée pour le public et les médias.

En complément de ces qualités équestres déjà citées (justesse et efficacité des aides, position et assiette), le cavalier doit être :

  • Élégant et sobre dans ces actions
  • Calme pour ne pas transmettre ses émotions à son cheval
  • Volontaire pour aller chercher les points

2 : Notes générales des protocoles de dressage.
3 : Points de pénalités = 1,5 x (100 - % moyen des juges).
4 : Edité par la FEI puis repris par la FFE dans le document en référence.
5 : La mise en main se traduit par l'engagement des postérieurs du cheval qui vient alors se poser sur son mors avec un appui léger en montant son dos. Son encolure et sa nuque sont relâchées.
6 : Par rapport au mot « propulsion », le terme français d’ « impulsion » ne se limite pas à la seule analyse du mouvement des membres mais aussi à l’envie du cheval à se porter en avant.
7 : Notion complexe et incontournable de l’équitation qui englobe la symétrie des allures et des mouvements à chaque main, la conformité de l’incurvation et la propulsion en ligne.

Le cross

Matthieu Van Landeghem et Safran du Chamois en cross © Ellen
Cross Matthieu Van Landeghem - Safran du Chamois © Ellen

Le cross consiste à réaliser un parcours incluant dénivelés et plusieurs obstacles naturels isolés ou combinés, dans un ordre défini et dans un temps donné, sans commettre de faute. Le cross s’effectue dans un rythme de galop soutenu, en recherchant le « temps idéal » fixé par la longueur et la difficulté du parcours, ou sur un choix tactique. A vitesse élevée, il faut maîtriser l'amplitude des foulées, l’équilibre du cheval, la qualité des abords (tracé, orientation, place d’appel…), tout en gérant son temps en fonction de la topographie du terrain et de la complexité des obstacles.

Il s’agit d’un couple, cheval et cavalier, qui doivent se compléter, construire ensemble une relation particulière et tisser un lien de confiance.

C’est une épreuve à fort coût énergétique qui nécessite pour le cheval :

  • De la franchise et du courage
  • De l’endurance et de la résistance à l’effort
  • De la force, de la souplesse

Parmi les points forts indispensables, on peut citer :

  • Un bon mental et du sang froid
  • Une santé parfaite pour pouvoir être entraîné sans risque et pour résister aux sollicitations d’une épreuve d’extérieur sur des terrains de plus ou moins bonne qualité
  • Une bonne classe de galop avec un bon équilibre permettant de réaliser l’épreuve avec plus de facilité dans un bon temps
  • Une adresse et une agilité naturelle ou développée à l’entraînement, qui lui permettront de réagir avec intelligence et à propos dans les situations difficiles ou combinaisons complexes
  • Une bonne aptitude au saut pour assurer un franchissement économique d’obstacles conséquents et/ou placés dans des situations peu favorables à la prise d’élan

De son côté, le cavalier doit présenter des qualités :

  • De courage et d’engagement dans cette épreuve dite «à risque»
  • De «froideur» devant la difficulté pour garder une capacité d’analyse quelle que soit la situation notamment en condition dégradée
  • D’équilibre pour ne pas gêner son cheval dans des combinaisons difficiles, dans les dénivelés importants ou les obstacles de terre spectaculaires
  • De force aussi bien des membres inférieurs (pour garder son cheval tendu notamment en fin de parcours), des membres supérieurs (avec des chevaux débordant d’énergie), que des muscles du maintien et du gainage pour résister dans son haut du corps et avoir des actions adaptées
  • De vision des abords dans toute la gamme, à vitesse élevée en avançant ou lentement en freinant
  • D’analyse pour faire les bons choix à la reconnaissance du parcours en fonction du niveau du couple, des objectifs du moment, et pendant le parcours pour réagir à propos lors d’imprévus

Le saut d'obstacles

Arnaud Boiteau et Quoriano en CSO © A. Laurioux
Arnaud Boiteau, Quoriano © A. Laurioux

Le parcours de saut d’obstacles est composé d’obstacles mobiles qu’il faut franchir dans un ordre défini, dans un temps imparti et sans commettre de faute. S’il y a faute aux obstacles ou dépassement du temps accordé, le couple cavalier-cheval reçoit des points de pénalités.

L’hippique permet de tester la récupération et d’évaluer le respect et la technique du cheval lors de l’enchaînement d’un parcours. Ses qualités ne doivent pas s’être dégradées avec les efforts consentis sur le cross.

Le cheval doit :

  • Développer une bonne récupération ce qui témoigne d’une préparation efficace
  • Avoir des capacités de saut suffisantes compte tenu des dimensions des obstacles
  • Être froid à l’environnement des arènes de grands concours

Le cavalier doit :

  • Être habile pour gérer un parcours sur un cheval fatigué à l’équilibre dégradé. Le cheval n’aura ni les mêmes marges de manœuvre ni la même réactivité aux actions du cavalier
  • Être particulièrement peu émotif pour ne pas perdre ses moyens dans l’ultime épreuve où tout peut se jouer

Conclusion

Cette brève analyse du concours complet d’équitation permet de situer les grandes qualités nécessaires au cheval et au cavalier. Elle positionne cette discipline par rapport aux autres, sportives et équestres, en la démarquant pour ce qui lui est spécifique ou en faisant ressortir de nombreuses compétences transversales. Enfin pour un couple donné, à un moment de sa carrière, il est possible de vérifier si les capacités incontournables sont effectivement présentes et si elles peuvent être encore développées par une préparation plus spécifique.

En savoir plus sur nos auteurs
  • Patrick GALLOUX IFCE - Phd, BEES 3 Équitation, ancien Écuyer du Cadre noir de Saumur, Inspecteur de la Jeunesse et des Sports (HC)
  • Guy BESSAT (BEES 3 Athlétisme, préparateur physique de cavaliers, consultant à l’ENE de Saumur pour la mise en place du suivi de la condition physique)
  • Philippe MULL ifce - BEES 2 Equitation, Ecuyer du Cadre noir et entraîneur du Pôle France jeune de concours complet

Bibliographie

  • GALLOUX P. : Concours complet d’Equitation (234p), Belin 2011
  • BOITEAU A. : Le cheval de concours complet : éducation et entraînement (240p), Belin 2016
  • BESSAT G. : « Le cavalier, ce sportif qui s’ignore tant – la condition physique, la clé de sa réussite » (Emilie Audibert, 2017) (fiches de travail et exercices adaptés aux cavaliers de tous niveaux)  bessatguy(at)gmail.com
Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

Ressources à télécharger

Document PDF
L'échelle de progression

Cette fiche vous a-t-elle été utile ?