Organisation sociale des ânes

Les ânes ont une organisation sociale différente de celle des chevaux. Cette fiche vous donne des informations sur ce qui a été observé sur les espèces d’équidés sauvages ayant une organisation sociale de ce type, notamment l’âne sauvage africain qui est l’ancêtre de nos ânes domestiques. Les informations sur la structuration sociale des ânes domestiques ou des ânes féraux en conditions semi-naturelles sont en effet rares.

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Par Marianne VIDAMENT - | 11.03.2019 |
Niveau de technicité :
Elevage d'ânes
Sommaire

Les groupes

Espèces sauvages ou ânes féraux en conditions naturelles

Les groupes sont de taille et de composition variées. Toutes les compositions de groupe sont possibles car les groupes se font et se défont. Dans ces groupes, les liens sociaux sont relativement lâches, sauf entre la mère et son jeune.

Par exemple, dans une île caraïbe assez petite avec un climat tropical, une population de 76 ânes féraux a été observée pendant un an. Ils étaient en fait répartis de 18 façons différentes, allant de mâles solitaires, de femelles solitaires à plusieurs mâles associés à plusieurs femelles accompagnées de leurs jeunes, la moyenne étant de 2 individus par groupe. Ces groupes étaient instables, c’est-à-dire que les groupes se modifiaient dans leur composition au bout de quelques jours ou de quelques semaines. Les mâles adultes étaient le plus souvent solitaires ou avec quelques autres mâles. Les femelles adultes étaient le plus souvent avec leurs jeunes et d’autres femelles et éventuellement avec un mâle. Quelques femelles gestantes ont été observées : elles se sont isolées pour mettre bas et revenir vers les autres pendant 20 à 100 jours.

En Grèce, lors d’un recensement d’une population de 800 ânes féraux répartis sur 132 km², 95 groupes d’ânes ont été observés. Les groupes étaient en moyenne constitués de 8 ânes.

En conditions domestiques

ânes au pré
Les ânes forment facilement des paires © A. Bassaler
Les ânes forment facilement des paires. Dans une étude sur 55 ânes adultes non apparentés (femelles sans jeunes et mâles castrés) répartis en 7 enclos et observés pendant 1 mois, 79% des ânes avaient un voisin préféré et la relation était réciproque dans 69% des cas. D’autre part, il est décrit que certains ânes ont été extrêmement affectés par la séparation d’avec leur compagnon.
Même si le groupe est assez lâche avec des individus plus ou moins proches, l’ensemble des animaux va bouger si quelques individus du groupe initient un déplacement.


Anesse et son anon
Au moment de la mise-bas et pendant les jours qui suivent, l’ânesse s’isole des autres © A. Bassaler
L’ânesse s’isole des autres au moment de la naissance de son jeune, quitte à ne pas utiliser l’abri où se trouvent les autres membres du groupe, puis revient au bout de quelques jours vers le groupe. Pendant l’élevage de son jeune, l’ânesse peut rudoyer fortement son ânon, notamment les mâles, s’il est trop curieux, qu’il lui grimpe dessus ou la mord. Le sevrage spontané s’opère à 6-8 mois.

Le mâle défend son territoire en présence de femelles en chaleurs

Espèces sauvages ou ânes féraux en conditions naturelles

Lors de la saison de reproduction, certains mâles défendent activement leur territoire à partir du moment où une ânesse en chaleurs est dessus. En général, le territoire est placé à un endroit stratégique où les femelles ont toutes chances de passer pour aller boire ou manger. Des mâles non territoriaux peuvent rentrer sur le territoire, du moment qu’ils montrent un comportement de soumission et qu’ils ne s’occupent pas des ânesses en chaleurs.

En conditions domestiques

La cohabitation de baudets reproducteurs avec d’autres baudets ou des ânes castrés peut être difficile et nécessite de très bonnes clôtures, surtout si ces mâles peuvent voir des ânesses. Quand un nouveau mâle arrive dans le groupe, le baudet dominant en place le chevauche et le mord pendant 1 semaine ou plus, cela dépend de son agressivité. Si un nouveau baudet est retiré du groupe pour une saillie, il peut se faire attaquer par le baudet dominant à son retour. Il peut donc être nécessaire de séparer les mâles pendant la saison de reproduction. Ce niveau d’agressivité chute fortement s’ils ne voient pas de femelles ou en fin de saison de monte.

Que se passe-t-il quand on mélange des chevaux et des ânes ?

Une étude s’est intéressée à l’organisation sociale de 8 chevaux, 4 mules et 4 ânes (ces derniers connaissant chacun un des 8 chevaux) mis ensemble dans une grande pâture et ne se connaissant pas antérieurement (à l’exception des 4 paires cheval-âne). Au bout de 14 mois, les relations amicales observées ont permis de distinguer le groupe des chevaux (avec 2 sous-groupes), le groupe des mules et le groupe des ânes. La hiérarchie était linéaire [1] entre les chevaux, assez linéaire entre les mules et non linéaire chez les ânes. Les chevaux étaient dominants sur les mules qui étaient dominantes sur les ânes.

[1]hiérarchie linéaire : A domine B, B domine C, donc A domine C

Ce qu’il faut retenir

En conditions naturelles ou semi-naturelles, les ânes n’ont pas la même structuration sociale que les chevaux, ils ne forment pas de familles stables. Ils ont tendance à se mettre en très petits groupes. La composition de ces groupes serait assez lâche même si les ânes domestiques adultes ont tendance à se mettre en paires. Pendant la saison de reproduction, les mâles dominants ont un territoire et attaquent facilement les autres mâles. Cette organisation pourrait s’expliquer par leur évolution dans leur milieu d’origine : le désert.

Conséquences pratiques

Les conséquences de cette structuration sociale sont nombreuses :

  • Favoriser les contacts sociaux au maximum avec au moins un autre âne ;
  • Faire très attention aux ânes mâles pendant la saison de reproduction, qui peuvent avoir de fortes réactions vis-à-vis d’autres mâles, entiers ou non.
En savoir plus sur nos auteurs
  • Marianne VIDAMENT Docteur vétérinaire - ingénieure de projets & développement « Éthologie » et « Médiation équine » IFCE

Bibliographie

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  • KLINGEL H., 1975. Social-organization and reproduction in equids. J. Reprod. Fertil., 23, pages 7-11.
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  • RUDMAN R., 1998. The social organisation of feral donkeys (Equus asinus) on a small Caribbean island (St. John, US Virgin Islands). Applied Animal Behaviour Science, 60(2-3), pages 211-228.
Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

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