Organisation sociale des chevaux

Bien que le cheval ait été domestiqué depuis plus de 5000 ans, l’organisation sociale des chevaux domestiques retournés à l'état sauvage (chevaux féraux ou marron) ou élevés en semi-liberté est la même que celle des chevaux de Przewalski, leurs cousins, actuellement en réserves ou réintroduits en Mongolie. En conditions naturelles ou semi-naturelles, en dehors de quelques rares individus solitaires, les chevaux vivent soit en groupe familial soit en groupe de mâles célibataires.

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Niveau de technicité :
troupeau de chevaux dans un pré
Sommaire

Le groupe familial

Troupeau au galop
© A. Bassaler

Le groupe familial, aussi appelé « harem », se compose en général d’un étalon, de 2 à 4 juments et des jeunes jusqu’à 2-3 ans.

Certains harems comptent 2 étalons, il existe alors une hiérarchie entre eux.


Les adultes constituent le noyau dur du harem. En grandissant, les jeunes sont généralement appelés à quitter le groupe :

  • Les jeunes femelles quittent souvent la famille lors de leurs premières chaleurs (vers 3 ans dans la nature) pour rejoindre un mâle célibataire ou un autre harem. Il arrive qu’elles restent au sein de leur harem d’origine, en particulier si l’étalon chef de famille n’est pas leur père ;
  • Les jeunes mâles quittent le harem vers 2-3 ans, d’eux-mêmes ou contraints par le chef de famille. Ils rejoignent alors généralement un groupe de mâles célibataires.

Le groupe de mâles célibataires

Un groupe d’étalons célibataires © Pixabay
Les mâles célibataires vivent généralement en groupe. Le groupe des étalons célibataires comprend tous les mâles n’ayant pas de famille. A partir de 5 ans, les mâles sont considérés comme socialement matures. La majorité d’entre eux essaie en permanence de quitter le groupe pour constituer un harem. Il existe plusieurs manières de constituer un groupe familial : accaparer une jeune jument qui quitte son groupe natal, défier un étalon chef de famille et le battre, remplacer un étalon mort, etc.

Le domaine vital

En conditions naturelles, les chevaux vivent soit en groupe familial, soit en groupe de mâles célibataires, sur un domaine vital non défendu © Ifce
Dans la nature, les groupes de chevaux évoluent dans un espace appelé « domaine vital », dans lequel ils trouvent ce dont ils ont besoin pour vivre : eau, nourriture, abri, congénères, minéraux...

Les chevaux sont très attachés à leur domaine vital, mais ne le défendent pas à proprement parler : les domaines vitaux de plusieurs harems peuvent ainsi se superposer.

La taille du domaine vital est très variable car elle dépend de la disponibilité des ressources : plus les ressources (nourriture, eau) sont abondantes, plus le domaine vital est petit. On peut ainsi observer des domaines vitaux allant de 1 km² à 80 km² ! Leur taille varie ainsi en fonction des saisons, qui modulent la disponibilité des ressources.

Les relations dans le groupe familial

comportement social du cheval
Exemple d’activité collective : les chevaux vont boire les uns après les autres, dans le même laps de temps © Ifce
Le groupe familial est une structure stable qui peut perdurer pendant des années. L’étalon entretient des relations privilégiées avec quelques juments, et les juments sont liées entre elles par un fort attachement. Elles ont en général 1 ou 2 juments préférées. Les juments ont également un lien très fort avec leurs poulains. Ce lien a une intensité qui diminue graduellement, mais il se maintient même quand ils ne têtent plus. Le sevrage se fait vers 10 mois si la jument est pleine et peut être beaucoup plus tardif si elle ne repouline pas.
On peut reconnaître la stabilité d’un groupe aux activités collectives : manger, boire, se rouler, se suivre en file indienne, etc.



Un étalon en position de conduite © Pixabay
L’étalon doit veiller à la conservation de son groupe : en cas de menace, il va rassembler les membres de son harem par une posture caractéristique, tête vers le bas, encolure allongée, appelée « conduite » ou chasser l'intrus.


Dans le groupe familial, la hiérarchie est linéaire [1].

[1] hiérarchie linéaire : A domine B, B domine C, donc A domine C

Dans la plupart des groupes familiaux, l’individu dominant est en général une jument, c’est rarement un étalon. Les adultes sont dominants sur les jeunes. Voir les signes de dominance et de soumission dans la fiche sur le comportement social du cheval.

Les relations sociales dans le groupe des étalons célibataires

Deux étalons effectuant un rituel © Pixabay
Au sein de ce groupe, les étalons célibataires consacrent beaucoup de temps au jeu et à la simulation de combats. C’est là qu’ils développent les comportements de futurs étalons de harem comme la conduite, le marquage et les rituels.

Dans ce groupe, la hiérarchie est le plus souvent linéaire (voir définition dans le paragraphe précédent), avec les jeunes mâles qui sont dominés par les mâles plus âgés.

Les relations entre les groupes

Dans la nature, les groupes évitent généralement de s’approcher les uns des autres. Ils partagent cependant généralement au moins une partie de leur domaine vital, et peuvent donc être amenés à interagir. Les harems sont alors plus proches entre eux que du groupe des mâles célibataires.

Dans le cas où des groupes utilisent une même ressource limitée (par exemple un point d’eau),il apparaît une hiérarchie entre les groupes : la famille dominante aura accès à la ressource en priorité.

Dans une configuration où les ressources sont abondantes, les individus de groupes différents se rassemblent parfois, mais auront tendance à s’ignorer malgré la proximité physique. Leur regroupement semble alors constituer une forme de défense contre les prédateurs.

Organisation sociale dans les groupes domestiques non familiaux

Dans les groupes de juments ou de juments et de hongres, la hiérarchie est nettement linéaire. Cette hiérarchie est fonction de l’âge, de l’ancienneté dans le groupe et quelquefois du poids. Le sexe ne semble pas avoir d’importance.

Organisation sociale dans les groupes de jeunes chevaux

Dans les groupes de jeunes chevaux, les comportements sont différents de ceux observés sur des jeunes chevaux dans des groupes familiaux en conditions semi-naturelles. Dans plusieurs études françaises, il a été montré que le fait de rajouter un ou des adultes à ces groupes permet d’augmenter l’expression des comportements amicaux entre jeunes et de diminuer l’agressivité globale des individus. Ceci est bénéfique dès le sevrage.

Ce qu'il faut retenir

A l’état naturel, les chevaux vivent en groupe et sont rarement seuls. Ils ont des liens stables et durables avec d’autres chevaux d’âges différents qui leur sont familiers. Ces liens sont complexes. Dans ces groupes, les jeunes chevaux apprennent les comportements sociaux de l’espèce, donc les « codes » en côtoyant les mêmes adultes pendant de nombreuses années.

Remarque : Les ânes n’ont pas la même structuration sociale.

Conséquences pratiques

Les conséquences de cette structuration sociale sont nombreuses lors de la gestion des chevaux en conditions domestiques. Voir la fiche « Comment organiser et gérer les groupes de chevaux ? ».

En savoir plus sur nos auteurs
  • Hélène ROCHE Éthologue - Éthologie du cheval
  • Anne-Claire GRISON IFCE
  • Marianne VIDAMENT Docteur vétérinaire - ingénieure de projets & développement « Éthologie » et « Médiation équine » IFCE
  • Léa LANSADE Ingénieure de recherche en éthologie IFCE-INRAE
  • Claire NEVEUX Ingénieure de recherche en bien-être équin - Ethonova
  • Christine BRIANT Docteure vétérinaire - ingénieure de projets & développement « Bien-être des équidés » IFCE

Bibliographie

  • BOURJADE M., 2007. Sociogenèse et expression des comportements individuels et collectifs chez le cheval. Thèse de doctorat, Université Louis Pasteur. Disponible sur : http://scd-theses.u-strasbg.fr/1427/
  • BOURJADE M., MOULINOT M., RICHARD-YRIS M.A. et HAUSBERGER M., 2008. Could adults be used to improve social skills of young horses, Equus caballus? Developmental Psychobiology, 50(4), pages 408-417.
  • INGOLFSDOTTIR H.B. et SIGURJONSDOTTIR H., 2008. The benefits of high rank in the wintertime - a study of the Icelandic horse. Applied Animal Behaviour Science, 114(3/4), pages 485-491.
  • HENRY S., ZANELLA A.J., SANKEY C., RICHARD-YRIS M.A., MARKO A. et HAUSBERGER M., 2012. Adults may be used to alleviate weaning stress in domestic foals (Equus caballus). Physiology & Behavior, 106(4), pages 428-438.
  • JORGENSEN G.H.M., BORSHEIM L., MEJDELL C.M., SONDERGAARD E. et BOE K.E., 2009. Grouping horses according to gender - Effects on aggression, spacing and injuries. Applied Animal Behaviour Science, 120(1-2), pages 94-99.
  • LEBLANC M.A., BOUISSOU M.F. et CHEHU F., 2004. Cheval qui es-tu ? Belin éditeur, Paris.
  • FUREIX C., BOURJADE M., HENRY S., SANKEY C. et HAUSBERGER M., 2012. Exploring aggression regulation in managed groups of horses (Equus caballus). Applied Animal Behaviour Science, 138(3-4), pages 216-228.
Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

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