Mon cheval a un poteau : la lymphangite

L’engorgement des membres est un signe clinique fréquemment observé chez les chevaux. La lymphangite se caractérise plus particulièrement par un gonflement important et aigu d’un membre, souvent un postérieur. Cette affection, d’origine infectieuse, ne doit pas être prise à la légère : en cas de prise en charge trop tardive, une déformation chronique du membre peut persister.

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Par Marie DELERUE - | 16.09.2019 |
Niveau de technicité :
lymphangite chronique
Sommaire

Comment se manifeste cliniquement une lymphangite ?

Chez le cheval, lorsqu’on parle de lymphangite, on entend un gonflement très rapide d’un membre, dû à une inflammation (suffixe « ite ») des vaisseaux lymphatiques. Cette affection touche le plus souvent les membres postérieurs et est le plus souvent unilatérale (un seul membre est touché).

Ce gonflement peut être impressionnant, la partie basse du membre pouvant être élargie de 2 à 3 fois par rapport à sa circonférence habituelle. Ce gonflement peut s’étendre très haut sur le membre du cheval : le plus souvent jusqu’au jarret, parfois jusqu’au grasset, voire à la mamelle. En appuyant légèrement sur la peau avec son doigt, l'empreinte persiste un court moment après avoir retiré le doigt. C’est ce qu’on appelle le signe du godet, caractéristique de la présence d’un œdème. On observe parfois un suintement de la peau associé (sensation grasse au toucher).

Cet œdème, responsable d’une tension très importante sur la peau, est très douloureux à la palpation et provoque le plus souvent une boiterie marquée. A ces signes locaux peuvent s’ajouter des signes généraux :

  • Une hyperthermie (T > 38,5°C).
  • Une perte d’appétit, un abattement, de la transpiration, des tremblements, une augmentation de la fréquence respiratoire, provoqués par la douleur et/ou l’hyperthermie.

Gonflement du postérieur gauche, vue de profil © C. Honhon
Gonflement du postérieur gauche, vue de derrière © A. Phelippeau
Gonflement du postérieur remontant à la mamelle © A. Phelippeau


Si l’inflammation est majeure et n’est pas prise en charge rapidement, une déformation du membre peut persister, associée à un épaississement de la peau et une boiterie chronique. Cette lymphangite chronique peut également perturber le fonctionnement de la couronne et ainsi affecter la pousse de la corne. Les récidives sont également fréquentes.

L’engorgement des membres est un signe clinique fréquent chez le cheval, qui peut avoir des causes diverses :

→ Un engorgement des membres, particulièrement les postérieurs, peut être observé chez un cheval nourri avec une alimentation riche en sucres et faisant peu d’exercice (cheval qui reste au box par exemple). Cet engorgement fait suite à un défaut de retour veineux. Il est souvent moins marqué, peu douloureux et se résolve spontanément avec l’exercice.  

→ Un engorgement peut également être observé lors d’affections dermatologiques des membres, par exemple lors de dermatophilose (gale de boue). Cet engorgement est moins marqué, d’apparition plus progressive.

→ Des œdèmes déclives (en regard des membres et sous le ventre) sont observés dans de nombreuses maladies comme des pathologies digestives, cardiaques, l’anémie infectieuse équine

→ Il existe une affection spécifique aux chevaux de trait, appelé lymphœdème progressif chronique. Cette maladie se caractérise par une inflammation, un épaississement de la peau et une fibrose (perte d’élasticité) de la partie distale des membres (antérieurs et postérieurs). Elle commence dès le plus jeune âge et progresse au cours de la vie du cheval, à l’origine d’une déformation importante des membres. De même, chez les chevaux avec des fanons épais, et en particulier les chevaux de trait, une dermatite (inflammation) des pâturons, due à la présence d’acariens (on parle de gale chorioptique) est fréquente.

Quels sont les mécanismes d’apparition d’une lymphangite ?

Une lymphangite est classiquement causée par une contamination bactérienne d’une plaie ou d’une simple piqûre ou abrasion de la peau.

Le système lymphatique est constitué :

  • Des vaisseaux lymphatiques
  • Des nœuds lymphatiques (ou ganglions)
  • Mais aussi d’autres organes lymphatiques (la rate par exemple)

Dans ces vaisseaux lymphatiques, la lymphe circule vers les nœuds lymphatiques. Le système lymphatique permet entre autres :

  • Le drainage des liquides qui se trouvent en excès dans les tissus et participent à la détoxification du corps.
  • La circulation des globules blancs, qui protègent l’organisme contre les agressions d'organismes extérieurs, comme par exemple les bactéries.

Lors d’une lymphangite, on observe une multiplication des bactéries surpassant les capacités fonctionnelles des nœuds lymphatiques qui peuvent à leur tour s’infecter. L’inflammation consécutive des vaisseaux lymphatiques empêche la circulation de la lymphe et le drainage des liquides inflammatoires du membre, à l’origine de l’œdème. En effet, contrairement au système sanguin, le système lymphatique ne comporte pas d'organe jouant le rôle de pompe (cœur).

Cette lymphangite, classiquement d’origine bactérienne, ne doit pas être confondue avec la lymphangite épizootique qui est due à un champignon, maladie exotique dont la France est indemne depuis 1945.

Une prise en charge rapide est nécessaire

La suspicion d’une lymphangite doit entraîner une intervention rapide du vétérinaire. Le diagnostic se fera principalement sur la base des signes cliniques et le caractère très aigu du gonflement, caractéristiques de la maladie. Le vétérinaire recherchera le point d’entrée des bactéries. Les blessures ne sont cependant pas toujours retrouvées, même après une observation minutieuse de la peau.

Un traitement rapide est indispensable afin d’éviter un passage à la chronicité et une déformation définitive du membre, de soulager la douleur du cheval et de favoriser la reprise de l’alimentation le cas échéant.

Ce traitement se base sur l’administration :

  • D’antibiotiques pour combattre l’infection.
  • D’anti-inflammatoires non stéroïdiens et/ou d’anti-œdémateux pour soulager la douleur et réduire l’inflammation et l’œdème.

Prise en charge d’une lymphangite au postérieur gauche, après soins locaux © A. Phelippeau
Il repose également sur des soins locaux : tonte du membre concerné, douche et nettoyage avec un antiseptique. Il est important de bien sécher le membre après la douche pour éviter la prolifération bactérienne.

Il est préférable que le cheval marche régulièrement pour favoriser le drainage de l’œdème. La prise en charge de la douleur est donc majeure. Même hébergé à l’extérieur, le cheval aura tendance à refuser de se déplacer. Si le cheval est hébergé en groupe, il est conseillé de le séparer de ses congénères afin qu’il puisse s’alimenter et boire facilement.

Pour les cas chroniques, il peut être intéressant de masser régulièrement le membre pour favoriser le drainage des fluides. La surveillance de ces chevaux atteints d’une forme chronique ou susceptibles de faire des rechutes doit être très régulière, afin d’intervenir le plus rapidement possible.

Ce qu’il faut retenir

La lymphangite se traduit par une inflammation et un œdème important d’un membre postérieur, le plus souvent.

Elle a pour cause une effraction de la barrière cutanée par des bactéries, puis leur multiplication.

Un traitement doit être rapidement entrepris pour soulager la douleur et éviter la chronicité de l’affection.

En savoir plus sur nos auteurs
  • Marie DELERUE Docteure vétérinaire - experte sanitaire spécialité équine et ingénieure de recherche & développement IFCE

Bibliographie

Pour retrouver ce document: www.equipedia.ifce.fr
Date d'édition : 15 05 2024

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